Les guerriers celtes qui envahirent l'Angleterre choisirent, pour leur part, le dragon comme emblème héraldique, symbole de souveraineté. Le dragon figura sur les boucliers des tribus teutoniques qui envahirent tour à tour l'Angleterre et, jusqu'au XVIe siècle, sur les pavillons de guerre des rois d'Angleterre ainsique sur les armoiries traditionnellement portées par le prince de Galles.
Le dragon rouge est l'emblème du Pays de Galle ,Mabinogi de Lludd et Llewelys raconte la lutte du dragon rouge et du dragon blanc, ce dernier symbolisant les Saxons envahisseurs. Finalement les deux dragons, ivres d'hydromel, sont enterrés au centre de l'île de Bretagne, à Oxford, dans un coffre de pierre.L'île ne devrait subir aucune invasion tant qu'ils n'auront pas été découverts.Le dragon enfermé est le symbole des forces cachées et contenues : les deux faces d'un être voilé. Le dragon blanc porte les couleurs livides de la mort,le dragon rouge celles de la colère et de la violence. Les deux dragons enterrés ensemble signifient la fusion de leur destin. La colère est tombée,mais les dragons pourraient resurgir ensemble. Ils demeurent comme une menace,une puissance virtuelle, prompte à se lancer contre tout nouvel envahisseur.
Les Scandinaves ornaient la proue de leurs drakkars (nomdérivé de « dragon ») de sculptures reproduisant les traits du monstre. Un récit scandinave raconte que le dragon Fafnir est tué par le jeune héros Sigurdr le Vôlsungr. Sigmundr, père de Sigurdr, était l'un des plus valeureux héros d'Odin (en fait, il pourrait bien être le tueur du dragon, le nom deSigurdr n'étant pas mentionné dans les sources anciennes). Ce même récit réapparaît plus tard dans la tradition germanique avec Siegfried pour héros. Le geste de Sigurd est le plus ancien texte épique de la poésie nordique. Ses racines historiques sont établies : le prototype de Sigurd fut le roi mérovingien Sigebert qui avait pour épouse Brunehaut,modèle probable de la Brune hilde de l'épopée. Luvre sous sa forme la plus ancienne fut écrite au Xème siècle et reprise par la suite, à partir du XIIème, en Scandinavie et en Germanie.
Dans les contes serbes et russes, le dragon est « le Serpent flamboyant ».II a des liens avec le feu, l'eau et les montagnes, c'est-à-dire avec lesfrontières de l'Autre Monde.
En Russie préchrétienne,on croyait que les éclairs étaient des dragons et on les associait au dieu du Tonnerre Perun. L'épopée de Dobrynia, vainqueur du dragon, exprime sous une forme allégorique la conversion de la Russie (à la findu Xe siècle).
Le dragon slave apparaît habituellement comme un ravisseur de femmes, soit une femme proche du héros, qui est transportée dans l'autre Monde, soit des jeunes filles qu'ilterrorise. Il joue également le rôle de gardien du pont en bois de tremble quienjambe une rivière tumultueuse et mène à l'autre Monde. Dans un cas comme dans l'autre, le héros doit vaincre le monstre et, au moment opportun,délivrer la prisonnière. Avant d'essayer de décapiter le dragon, il doi tignorer les railleries et lutter contre une irrésistible envie de dormir.
Les chansons serbes et bosniaques sur Zmaj OgnjeniVuk « le dragon-loup de feu » font le lien entre un loup-garou et un roi du XVe siècle : Vuk le Tyran. Les chansons rapportent qu'il est né avec une tache de vin (une marque rouge en forme de sabre sur son épaule droite) et des touffes de poils de loup, et qu'il crache le feu.Grandissant à une vitesse prodigieuse, il devient un guerrier, et il est seul capable de vaincre le dragon (peut-être parce que dragon lui-même).
Le dragon nous apparaît essentiellement comme un gardien sévère ou comme un symbole du mal et des tendances démoniaques. Il est en effet le gardien des trésors cachés, et comme tel l'adversaire qui doit être vaincu pour y avoir accès. C'est en occident le gardien de la Toison d'or et du Jardin des Hespérides ; en Chine,dans un conte des T'ang, celui de la Perle. La légende de Siegfried confirme que le trésor gardé par le dragon n'est autre que l'Immortalité. Mais ces aspects négatifs ne sont pas les seuls, ni les plus importants.
Le symbolisme du dragon est ambivalent, ce qu'exprime d'ailleurs l'imagerie extrême-orientale des deux dragons affrontés, qu'on retrouve dans l'art médiéval,et plus particulièrement dans l'hermétisme européen et musulman, où cet affrontement prend une forme analogue à celle du caducée.C'est la neutralisation des tendances adverses, du soufre et du mercure alchimiques (alors que la nature latente, non développée, est figurée par l'ouroboros, le dragon qui se mord la queue).
En Extrême-Orient,le dragon comporte des aspects divers en ce qu'il est animal aquatique,terrestre (voire souterrain), et céleste à la fois ; ce en quoi on a pu le rapprocher de Quetzalcoatl, le serpent à plumes des Aztèques. En réalité, il ne s'agit que d'aspects distincts d'un symbole unique, qui est celui du principe actif et démiurgique : puissance divine, élan spirituel.
Symbole céleste en tout cas, puissance de vie et de manifestation, il crache les eaux primordiales ou luf du monde, ce qui en fait une image du Verbe créateur.Principe K'ien, origine du Ciel et producteur de la pluie, il est la nuée qui se déploie au-dessus de nos têtes et va déverser ses flots fertilisants. Si le symbolisme aquatique demeure évidemment capital, si les dragons vivent dans l'eau, font naître des sources, si le Roi Dragon est un roi des nâga (mais il s'identifie, ici encore, au serpent), le dragon est surtout lié à la production de la pluie et du tonnerre, manifestation de l'activité céleste. Unissant la terre et l'eau, il est le symbole de la pluie céleste fécondant la terre. Les danses du dragon, l'exposition de dragons de couleur appropriée permettentd'obtenir la pluie, bénédiction du ciel.
En conséquence le dragon est signe de bon augure, son apparition est la consécration des règnes heureux. Il arrive que, de sa gueule ouverte, sortent des feuillages :symbole de germination. La montée du tonnerre, qui est celle du yang, de la vie, de la végétation, du renouvellement cyclique, est figurée par l'apparition du dragon, qui correspond au printemps, à l'Est, à la couleur verte. Le dragon s'élève dans le ciel à l'équinoxe de printemps et s'enfonce dans l'abîme à l'équinoxe d'automne ; ce que traduisent les positions des étoiles kio, et ta-kio, Epi de la Vierge et Arcturus, les cornes du dragon. Astronomiquement, la tête et la queue du dragon sont les nuds de la lune, les points où ont lieu les éclipses: d'où le symbolisme chinois du dragon dévorant la lune et celui, arabe, de la queue du dragon comme région ténébreuse.
Mais l'ambivalence est constante : le dragon est yang comme signe du tonnerre, du printemps, de l'activité céleste ; il est yin comme souverain des régions aquatiques. Yang en ce qu'il s'identifie au cheval, au lion (animaux solaires),aux épées ; yin en ce qu'il est métamorphose d'un poisson ou s'identifie au serpent. Yang comme principe géomantique ; yin comme principe alchimique (mercure).L'axe des dragons, dans le thème astrologique, est aussi nommé axe de destinée.La tête du dragon, qui indique le lieu du thème où doit se construire le foyer de l'existence consciente, est opposée à la queue du dragon, qui brasse toutesles influences venues du passé, le karma dont il faut triompher. Ces deux parties du dragon sont également appelées nuds lunaires, nord et sud ; il s'agit des points ou la trajectoire de la lune croise celle du soleil.
En alchimie,le dragon est le symbole du mercure philosophal. Deux dragons qui se combattent désignent les deux matières du grand oeuvre, l'un est ailé et l'autre pas, pour signifier la fixité de l'une, la volatilité de l'autre. Lorsque le soufre,fixe, a changé en sa propre nature le mercure, les deux dragons font place à la porte du jardin des Hespérides, où l'on peut cueillir sans crainte les pommes d'or...